La démarche

La Banque des Territoires (groupe CDC), France urbaine, le groupe Patriarche et le consultant JLM Conseil, chacun dans son champ d’activité, participe quotidiennement au développement de la France de l’innovation.

Terme trop souvent galvaudé, l’innovation lorsqu’on s’y intéresse concrètement, prend des formes plurielles, et est répartie sur l’ensemble du territoire et mobilise des combinaisons infinies d’acteurs. Ce processus vertueux a pris de l’ampleur depuis une dizaine d’années et gagne en visibilité et attractivité au-delà des milieux informés : monde de l’entreprise, de la recherche, de la finance, pour toucher les jeunes, des associations et des acteurs locaux dans toute leurs diversités.

En parcourant la France à travers ce prisme des « lieux qui changent l’innovation » nous avons voulu non pas caractériser l’innovation mais révéler, mettre en perspective ces lieux qui l’incarnent, la stimulent et l’hébergent.
Ce sont tous des espaces de projets, de rencontres, de démonstrations qui servent de porte-drapeau opérationnel de l’innovation dans toute sa diversité.

À travers cette démarche, nous souhaitons initier un débat sur le rôle, l’organisation, les services, les modèles d’exploitation, les modalités d’ancrage immobilier et territorial de ces lieux qui changent l’innovation en France.

"Lieux d’innovation"

Ces lieux, aussi différents, ouverts, actifs et entreprenants sont globalement des catalyseurs, des incubateurs de la nouvelle économie qui participe à relever les défis de notre société contemporaine. Ils hébergent de nouveaux entrepreneurs mobilisés pour imaginer, développer et décarboner les activités productives, pour développer l’économie circulaire, pour concevoir des solutions nouvelles pour la santé, pour proposer de nouveaux schémas de production et de distribution alimentaire, pour développer des services numériques repensés, ou des services à la personne qui tout simplement participent à une meilleure intégration sociétale.

Ces lieux sont bien plus qu’une simple réponse servicielle ou technologique, ils expriment et mettent en scène la nécessité du collectif, de l’échange et de la transversalité comme base de l’innovation.

L’un des principaux enseignements de la démarche est qu’il n’y a pas de loi intangible et que l’innovation relève plus de la culture que de la seule technologie, de la capacité d’échanges, de création de combinaisons, de tentatives, de prises d’initiative.

En tant que développeur, « faiseur », partie prenante du territoire nous savons tous que l’innovation, processus hautement complexe, découle des rencontres et des connaissances, des rencontres de connaissances.

L’innovation n’est pas innée. Ce n’est pas une donnée mais plutôt un processus.

Écosystèmes territoriaux

La compétitivité se joue de plus en plus dans la capacité mobilisatrice des écosystèmes eux même localisés.

« Les régions qui gagnent sont celles qui présentent un haut niveau de coopération » Pierre Veltz - La France des territoires, défis et promesses - éditions L’Aube - 2019.

Nous avons voulu voir de plus près, sur le terrain, dans les villes, dans les territoires comment ont été prises en main ces problématiques, comment se sont créés ces espaces, ces réseaux pour accélérer et améliorer qualitativement et quantitativement l’Innovation.

Les systèmes locaux sont inégaux sur ce sujet et fonction du dynamisme des acteurs : universités, entreprises, pays, villes etc. Ils présentent et développent des capacités et donc des résultats hétérogènes. Les acteurs locaux n’ont eu de cesse de déployer des moyens pour renforcer, accélérer, rendre plus visibles les qualités d’innovations du territoire à travers les technopoles, les plateformes technologiques, les incubateurs spécialisés ou ZIRST et espaces d’innovation, objet de cette publication.

Le « faire ensemble » domine aujourd’hui pour prendre en main de nombreuses fonctions, de nouveaux usages réclamés par les utilisateurs : espaces partagés, ateliers partagés, coworking, fablab, lieux d’expérimentations, lieux de rencontres, espaces conviviaux, lieux de conseils, lieux de formation, lieux d’exposition...et si possible toutes ces fonctions plutôt que quelques-unes !

Ces espaces deviennent des lieux totem du « tout en un » territorial, des lieux démonstratifs de la qualité de l’écosystème local, de sa capacité de mobilisation des service, de rassemblement, de « collectivisation », de coopération et de mise en lumière. Ces nouveaux lieux émergent partout en France sur des sujets divers et répondent aux besoins des entrepreneurs aussi différents soient ils : conseils, formations, fablab, showrooms, événements. Ils apportent en sus de la visibilité, des aménités urbaines et de l’animation territoriale.

Bien sûr ils ne manquent pas de défauts et de faiblesses : modèle économique pas toujours facile à valider, difficultés d’ouvertures au plus grand nombre versus entre-soi du monde de la start-up, tout numérique, petitesse de l’équipe managériale qui renvoie au modèle économique et, aussi, dynamiques fortement contrariées par la crise sanitaire, bien évidemment.

L’immobilier stimulant

Ces lieux aujourd’hui jalonnent les territoires en France, ils s’appellent H7 à Lyon, RaiseLab à Paris, le Connecteur à Biarritz, KMØ à Mulhouse ou encore le MoHo à Caen. Ils ont tous un point commun étonnant d’utiliser leur cadre bâtimentaire comme un élément de marketing, un marqueur urbain et symbolique.

Bâtiments neufs ou réhabilités (néoindustriels), ces espaces semblent tous démontrer et justifier leur place dans la ville par une architecture signifiante. Cette dimension tendant même à devenir première pour faire de ces lieux ce qu’ils prétendent être : des espaces ouverts, conviviaux, accessibles à tous, flexibles, opérationnels, des totems qui assument une visibilité. Leur localisation, leur programmation, la conception même deviennent des instruments essentiels de leur fonctionnalité.

Paradoxalement, l’immobilier s’inscrivant toujours dans des cycles plus lents que ceux de l’innovation, l’enjeu à venir semble plutôt résider dans la capacité collective à passer d’une architecture signifiante à un immobilier stimulant, évolutif, adaptable, capable d’accommoder les besoins non connus à ce jour, mais déterminants demain.

Approche

Ainsi, notre approche a été d’identifier parmi plus de 300 lieux identifiés initialement, une sélection de 25 qui, par leur organisation, leur modèle, leur offre de services, leur ancrage territorial représentent l’excellence dans leur capacité à « rendre service » concrètement aux entrepreneurs de toute nature ; c’est-à-dire à toute personne ou communauté qui prend une initiative pour développer un projet, une entreprise, un projet touristique, un nouveau commerce, de nouvelles formations, de nouveaux modèles de financement, etc.

Notre parti pris a été de sélectionner, pour mieux mettre en avant les lieux qui nous apparaissent comme les plus représentatifs, les plus emblématiques de ces nouvelles plateformes collaboratives des territoires. Il s’agit simplement de présenter des pratiques, des initiatives qui font le jeu du collectif, du territoire et de l’émergence d’écosystèmes locaux.

L’objectif est tout autant de montrer la diversité des offres, souvent issues d’histoires locales et de rencontres humaines, que de mettre en avant ce qui les rassemble : implication territoriale, ouverture, conscience sociétale, offre de services d’accompagnement, évolution des modèles économiques, résilience aux crises."

Cet angle de travail ne nous condamne pas à l’exhaustivité ni même à l’analyse scientifique. Cette « revue de lieux » a permis de mettre en évidence un
« patrimoine génétique commun » qui pourrait se résumer ainsi :

  • Ils sont constitués d’un ou plusieurs bâtiments réhabilités ou neufs, largement ouverts sur l’extérieur et dans des quartiers en devenir ou en mouvement ;
  • Ils offrent une large palette de services aux entreprises et entrepreneurs : espaces de collaboration, conseils, formations, plateforme de financement, laboratoires / fab lab, offre évènementielle, etc ;
  • Ils portent une image pour eux-mêmes et pour le territoire de référence, qui le revendique : c’est un totem, un marqueur du territoire ;
  • Ils sont pilotés et managés par un opérateur public ou privé identifié et pourvu d’un modèle économique qui présente une première démonstration de pérennité ;
  • Ils portent un projet singulier : démonstrateur pour l’environnement, hub de l’industrie, numérique mais non exclusif. C’est un lieu tête de réseau d’un écosystème local ;
  • Ils sont ouverts sur l’extérieur, avec l’accueil d’un public élargi, favorable aux interactions multiples, avec des services de proximité : restauration, bar, manifestations locales, animation locale.

Nous avons également porté une attention particulière à ne pas doublonner des travaux de recensement déjà réalisés (cf. étude APUR de décembre 2021 pour l’Ile de France). Bien sûr, notre démarche s’est également heurtée à différents écueils comme la difficulté de rencontrer et de contacter les animateurs de ces lieux, la difficulté de collecte d’informations qualifiées tant le marketing l’emporte globalement sur toute autre information factuelle, difficultés d’évaluation, de retour d’expérience dans le temps etc.

Cette sélection des 25 premiers lieux n’est qu’une première étape de la démarche qui a vocation à s’actualiser tous les deux ans, en continuant d’enrichir – nous l’espérons – le dialogue et l’analyse des facteurs clés de réussite et mais aussi des risques ou facteurs limitants.

Cet ouvrage est destiné à tous ceux qui de près ou de loin s’intéressent à l’innovation et au processus de coopération. Il s’adresse à tous les acteurs du développement : État, collectivités, investisseurs, utilisateurs, universités, laboratoires de recherche, entrepreneurs, développeurs des territoires… toutes celles et ceux qui œuvrent pour que des nouvelles initiatives et de nouvelles entreprises à impact émergent partout en France !